Sans filtre #4 / soumission

Quelle jouissance exquise, et quelle tristesse à la fois, de voir tout ce petit monde s'énerver pour un livre. Un pays malade, en pleine déflagration, secoué par un livre ; tu parles d'une grande puissance. Si nous étions plus solides dans nos chaussettes, cet ouvrage nous ferait le même effet qu'une compile des Frero Delavega.

Un auteur chétif, déprimé, résolu, aigri et gris, qui passe de plateaux en plateaux bredouiller sa fragile liberté. Liberté d'écrire ce qu'il veut, d'imaginer, de se projeter, de vomir s'il le souhaite, d'éructer, de haïr, de magnifier, de craindre, d'aligner des mots avec ou sans sens. J'entends des oies blanches, d'apparence, invoquer la "responsabilité de l'artiste", intenter des procès, crier au racisme et à l'islamophobie galopante, effrayés de constater les mutations d'un auteur "pourtant si brillant dans les Particules, quel dommage"... et j'ai envie de pleurer... De rire. La responsabilité de l'artiste, elle te prend le cul et provoque des mycoses à ton âme. La responsabilité de l'artiste, c'est de me garantir sa totale liberté de connerie, son exquise possibilité d'être mauvais, insignifiant, excessif, inabouti ou brillant. Islamophobe, raciste, frustré, ou cancrelat d'obédience Zemmourienne, je m'en fous, du moment qu'avec sa petite voix à la Françoise Sagan et sa clope qui pue il continue à écrire, à bousculer les niais, à manipuler l'ensemble d'une fourmilière médiatique, troupeau de mauvaise Foi, qui se fait enfler par tous les pores de son aveuglement buzzofile. Il nous domine, il est au sommet de son art.

Rien que pour cela, tandis que tout sur le fond me poussait à ne pas le faire, je vais acheter et lire le bouquin de Houellebec. Juste pour contribuer à sa liberté d'être libre et con ; et donc à la mienne.